Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
22 février 2006 3 22 /02 /février /2006 01:13

Dimanche 19 septembre 2004, la mésaventure de dimanche dernier recommence ! autoroute de Carcassonne, il pleut, peu, mais il pleut !

Mais à quelques pas de Limoux, le soleil pointe enfin derrière les Corbières ; ce moment où il est encore possible de le regarder dans les yeux.

Enfin la route qui mène au parking du château ; en la montant, en voiture, je repense à Montségur et je bénis les accès proches, très proches. 10 mn à pieds du parking jusqu’à l’entrée sur un chemin pierreux qui serpente langoureusement afin d’atténuer la pente à gravir : 600 m d’altitude. Le temps magnifique offre une vue superbe, je passe la porte d’entrée et je paye 4 euros ! Ce sont aujourd’hui les journées du patrimoine et les entrées aux monuments et musées sont en principe gratuites. Mais nous sommes en pays de rébellion, loin, très loin de la capitale centralisatrice qui légifère de son point de vue strict.

Pour la seconde fois, je suis fier de moi, je l’ai fait ; c’était bien sûr moins dur que Montségur mais je suis content. Je continue la visite, pour 4 euros je vais rester ! Le donjon, 35 m, un escalier en colimaçons pour accéder à 2 salles ( celle des gardes et celle des musiciens ) et au toit terrasse. Là même sans parler de l’amour des vieilles pierres ou du Moyen-Âge, c’est le choc ! Le donjon est carré, donc la terrasse aussi et le petit muret n’arrive qu’à hauteur de mes mollets ! Aucune autre protection, mais une vue circulaire à 360° !!!!! C’est impressionnant, j’en ai le vertige, j’ai peur de me pencher trop ; I’am the king of the world.

Un couple de touristes d’une cinquantaine d’années qui a eu l’excellente idée de suivre mes pas, mon sens et mon horaire se retrouve là en même temps que moi et à haute voix, la femme fait admirer toute l’étendue de ses préoccupations : Quel solarium s’écrie t-elle. Une chose est certaine, ici à part les hirondelles qui virevoltent rien ni personne ne verrait quelqu’un prendre un bain de soleil.

Partager cet article
Repost0
22 février 2006 3 22 /02 /février /2006 01:09

Pas de chance il pleut depuis Foix et la brume est bien accrochée à la montagne. 

 

C’est une drôle d’impression, je suis seul sur le parking au pied du Pog. Le sentier est là, je ne vois pas à plus de 3 ou 4 mètres ; mon imagination me joue des tours : je me dis qu’à chaque pas va surgir une file de Bonshommes en robe de lin blanc ou encore 2 ou 3 chevaliers blason et épée en avant.

 

Je me décide, j’y vais !

 

Quelle montée, sous une pluie très fine, je fais l’Alpe d’Huez du piéton ! Un tout petit sentier, succession de virages, de pierres plates et glissantes et de madriers de bois en guise de marches ( 1207 m d’altitude ). Enfin je débouche sur une façade ( sud ouest, l’entrée principale ) qui me paraît immense, avec sa porte d’entrée en son centre, elle semble infranchissable !

 

Je passe la porte et me voilà au milieu du château ou plutôt de ce qu’il en reste. Cela ressemble à une cours intérieure, un patio ; le sol est en terre parsemé de quelques pierres qui rendent la marche difficile. Je m’assois, je bois et je regarde un moment ; la brume semble vouloir cacher l’édifice ! Quelques clichés, puis je traverse et je ressors par la porte nord est. En continuant au pied du mur par la gauche j’arrive à la citerne et à la salle basse du donjon.

 

Je croise un groupe d’Anglais émerveillés et un couple de Français qui avait choisi cet endroit bien précis pour passer un appel depuis un portable…

 

Il est temps de redescendre, par le même chemin, c’est moins fatiguant mais tout aussi difficile, il faut freiner en permanence à cause de la pluie qui a rendu les pierres très glissantes. Je fais un arrêt à la stèle commémorative du bûcher ; elle témoigne du 16 mars 1244 où plus de 220 cathares sont montés sur un bûcher plutôt que d’abjurer leur foie et pour défier l’autorité du pape et du roi de France ; ce jour là se termina la croisade contre les Albigeois et l’existence des cathares.

 

J’ai manqué mon rendez-vous avec Montségur, la brume n’a pas voulu que je profite de la vue à 360° ! Je ne sais pas si je gravirais à nouveau le Pog de Montségur.

Partager cet article
Repost0
12 février 2006 7 12 /02 /février /2006 02:39
Ce soir là, la pleine lune offrait un spectacle incroyable. Les ombres des grands cèdres lui faisaient comme une moustache, et son reflet argenté coupait la mer de Sour à Syracuse. Le désert illuminé à l’infini invitait à une longue ballade comme une immense plage de sable blanc. Il n’y avait pas un souffle d’air ce soir là ; pourtant un court instant les grands cèdres agitèrent leurs cimes ostensiblement.
C’était un matin nouveau qui amenait le soleil jouant avec les Moai. Ces derniers regardaient à perte de vue, si loin, au-delà des îles australes. La mer était calme pourtant une rafale agita un bref moment les grands bras tombants des palmiers.
 
-         Capitaine, prêt ?
-         Pardon Commodore, j’effectuai un dernier passage, cela représente tant d’efforts.
-         2000 ans de travaux, songez qu’il n’y a aucune joie dans la décision du conseil ! Les délibérations sont closes et le verdict sans recours.
-         Commodore, le moment est venu ! Arrêt du projet EARTH dans 5, 4, 3, 2, 1……..
 
 
Trente ans plutôt, sur la planète Aerim, l’éminent chercheur Miera était très agité. Le conseil l’avait convoqué, pour des réponses, au sujet de son projet. Parmi tous les autres projets des Aeriméens, le sien était le plus controversé ; le chercheur avait déjà du répondre à d’autres convocations par le passé, mais celle-ci après 2000 ans de travaux était plus inquiétante.
Quand il arriva dans la salle du conseil, les 6 sénateurs membres étaient tous là.
 
-         Miera, les derniers rapports sur votre projet sont pessimistes, trop à notre avis !
-         Sénateur Reyjem, du temps, trois siècles tout au plus, et vous pourrez juger vraiment du bien fondé de ce projet.
-         Du temps, voilà 2000 ans et 1200 oures que vous soutirez au trésor de l’Alliance, sans résultats, et nous avons besoin de résultats ! Je vous rappelle que le jour de la transmigration est dans 100 ans, nous ne pouvons pas remettre nos spirits dans cette espèce, il nous faudrait trop de temps pour revenir à notre niveau actuel.
-         Mais l’évolution est sur une bonne échelle de temps, les projections le démontrent.
-         Non, mon cher Miera, je suis désolé, nous ne repartirons pas de si bas à la prochaine transmigration !
-         Sénateur Ejemyr, vous qui avez toujours appuyé le projet, qu’en pensez-vous ? Votre avis !
-         Miera mon ami, pour tout vous dire, nous 6 sommes allés voir sur place, ne nous contentant pas des rapports analytiques.
-         Alors vous avez constaté, les promesses sont évidentes, non ? Ils ont vaincu toutes les maladies primaires que nous avons envoyées.
-         ( Reyjem ) Ah oui, ils ont même déclenché des maladies que nous n’avions pas imaginées !
-         ( Miera ) Ils ont domestiqué leur environnement, bâti des empires !
-         ( Reyjem ) De qui vous moquez-vous ? Ils ont quasiment fait disparaître certaines autres espèces que nous avions introduit, empilé ruines sur ruines et déjà pillé la moitié de leurs ressources ! Et ils ne le savent pas encore.
-         ( Miera ) L’avancée technologique…
-         ( Reyjem ) Cette phase est une inutile perte de temps, nous le savons depuis 4 transmigrations. La force et l’élévation sont ailleurs, ils n’y arriveront jamais !
-         ( Ejemyr qui se taisait depuis le début ) Je suis désolé mon ami, vous savez mieux que quiconque nos impératifs, il nous est impossible d’interagir, ils devaient y arriver par eux-mêmes. Nous avons pourtant laissé le début du chemin, ils n’ont encore rien appris de probant de ce qu’ils nomment : Cercles de pierres, Tumulis, Menhirs, Dolmens ou Cromlechs ! Ils ont inventé des idoles au nom des quelles ils s’entretuent à coup de graviers !Tous les équilibres sont rompus, la fin est programmée ! Nous ne pouvons nous risquer à une si hasardeuse transmigration, c’est notre pérennité qui est en cause.
-         ( Reyjem ) Nous regardons encore 30 années, pendant lesquelles nous allons délibérer. Nous prendrons notre décision après ce laps de temps.
 
Le conseil se retira, laissant Miera abattu. Malgré tout son amour pour sa création et son implication dans cette aventure, il dût se résoudre, à la lecture du rapport des 30 dernières années sur le projet EARTH, à accepter la décision finale du conseil de l’Alliance. Voici les extraits significatifs qui décidèrent de son sort :
 
-         19 décembre 1972, le Sea Star, 115000 tonnes de fioul à la mer
-         11 mars 1978, Tel-Aviv, 2 cars détournés, 32 Israéliens tués
-         18 novembre 1978, jungle de Guyana, 913 suicidés
-         28 mars 1979, Three Mile Island, accident nucléaire, 5 sur l’échelle INES
-         27 décembre 1979, l’URSS envahit l’Afghanistan
-         22 septembre 1980, l’Irak bombarde un puît de pétrole iranien
-         8 décembre 1980, New-York, John Lennon assassiné
-         29 avril 1982, Chine: 1 milliard d’individus
-         1 septembre 1983, un mig Soviétique abat un avion civil Coréen
-         18 juillet 1984, San Ysidro, J.Huberty abat 21 personnes dans un McDo
-         3 décembre 1984, Bhopal, nuage toxique, 4000 victimes
-         26 avril 1986, Tchernobyl, accident nucléaire, 7 sur l’échelle INES
-         24 mars 1989, l’Exxon Valdez, 40000 tonnes de fioul dans la mer
-         4 juin 1989, Roumanie, découverte d’un charnier, 4630 victimes
-         2 août 1990, l’armée Iraquienne envahit le Koweït
-         19 avril 1993, Waco, 86 victimes dont 17 enfants
-         Mai 1993, Corée du Nord, test d’un missile à capacité nucléaire, portée 1000 Km
-         24 novembre 1993, Liverpool, 2 enfants de 11 ans enlèvent et battent à mort un bambin de 2 ans
-         3 janvier 1994, Maracaibo, émeute dans une prison, 100 victimes
-         5 février 1994, Sarajevo, un obus sur le marché, 66 victimes
-         25 février 1994, Hébron, massacre de 53 Palestiniens
-         10 mars 1994, aéroport d’Heathrow, des obus tirés par l’IRA
-         20 avril 1994, Colorado, 2 adolescents assassinent 12 élèves de leur collège
-         5 octobre 1994, Suisse, 48 membres de l’Ordre du Temple Solaire retrouvés morts
-         19 mars 1995, Tokyo, 5000 personnes intoxiquées au gaz sarin
-         19 avril 1995, Oklahoma City, 166 victimes
-         9 mai 1995, Zaïre, épidémie de fièvre ebola : 200 victimes
-         11 mai 1995, Inde, essais nucléaires souterrains
-         13 mars 1996, Dunblane, 16 écoliers assassinés
-         1997 : SIDA : 23 millions de personnes infectées, 6 millions de morts
-         30 décembre 1997, Algérie, massacre de 412 civils
-         17 octobre 1998, Nigeria, explosion d’un oléoduc, 700 victimes
-         23 septembre 1999, la Russie envahit la Tchétchénie
-         12 décembre 1999, l’Erika, 10000 tonnes de fioul dans la mer
-         31 octobre 2000, le Ievoli Sun, 6000 tonnes de produits chimiques dans la mer
-         11 septembre 2001, New-York, 2 tours, 2 avions, 3000 victimes.
 
-         (Miera) D’accord capitaine, allez-y ! Tout est fini.
 
Une grande lueur blanche illumina l’univers, et puis plus rien.
Partager cet article
Repost0
12 février 2006 7 12 /02 /février /2006 02:37
Cela faisait maintenant un bon mois que cette sensation ne me quittait plus ! A chacun de mes pas dans la rue, je me sentais suivi, regardé, épié. Il m’arrivait certains soirs, en rentrant chez moi de m’emporter presque au point d’en pleurer. Je n’ouvre plus les volets, je sursaute quand le téléphone ou la porte d’entrée se mettent à sonner.
Tout semblait avoir débuté lors de cet apéritif au bureau, celui du pot de départ de mon ancien patron ; Hélène était partie 15 jours auparavant et à cette époque je noyais mon chagrin en abusant de l’alcool. C’est vrai j’avais trop bu, mais je me suis excusé ! Pourtant je crois que ce que le vigile n’a vraiment pas aimé c’est quand je lui ai demandé si le sigle ( SGP ) de son employeur ne signifiait pas : Salut Gros Pédé. Les collègues ont eu toutes les peines du monde à me sortir de là.
C’est lui, il n’a pas digéré l’insulte d’un cadre condescendant, maintenant il veut se venger.
Quand j’y pense, il y a bien aussi ce chauffeur de taxi ; j’ai pas voulu le laisser sortir de sa place, enfin ça c’était le début ! Parce qu’après comme il gueulait, je lui ai fait des tas de bras d’honneur avant de reculer pour l’emboutir et de partir très vite avant qu’il réagisse. Il a du relever mon numéro, il connaît un flic et il a réussi à avoir mon adresse.
Non c’est l’autre, celui qui a pris Hélène, je l’ai traité de « petite bite », je savais qu’elle faisait une connerie, c’est un vicieux, il veut me faire payer, elle ne doit pas être au courant.
Toutes les nuits, sur le plafond, je fais défiler ma liste de suspects potentiels ; j’ai découvert avec stupeur le nombre de gens que l’on peut froisser ou plus tout au long de sa vie sans même y prêter attention sur le moment. A la question « lui connaissez-vous des ennemis ? », je réponds sans hésitations : oui monsieur l’inspecteur ! Des tas d’ennemis, tous les jours des nouveaux viennent grossir la liste. La question reste : lequel a été humilié au point d’avoir médité une si longue et insoutenable vengeance ?
Ma vie est devenu un véritable enfer, je ne supporte plus aucun bruit, tout m’inquiète ; à ce rythme, je ne vais pas tenir très longtemps. J’ai même fini par ne plus sortir or les « obligations ». Aussi m’étonnai-je moi même lorsque j’acceptai l’invitation de Paul et Virginie pour ce soir. Sans doute parce qu’ils étaient les derniers à encore me regarder normalement, et que je leur en étais reconnaissant. Mariés depuis 4 ans, ils vivaient dans le centre pas très loin de chez moi ; je connaissais Paul depuis le collège, je suppose que toutes ces raisons réunies ont forcé ma décision.
Le repas et la soirée furent, à la vérité, très agréable, il y avait si longtemps que je n’avais pas vécu ne serait-ce que quelques heures douces et reposantes dans un environnement amical. Il était 23H30 et je décidai de prendre congés de mes amis. L’air frais me fit du bien, j’avais bu mais sans abuser. Je presse le pas afin de monter au plus vite dans ma voiture que je verrouille immédiatement. Les rues étaient désertes en ce week-end de mai, je roulais fenêtre ouverte pour goûter encore l’air frais. Aucun feu routier ne semblait fonctionner. Parti depuis à peine 10mn, je remarquai une fumée blanche s’échappant du capot avant ; il n’était absolument pas question de m’arrêter et encore moins de sortir du véhicule. Je ralentis et je commençai à regretter d’être sorti de nuit, maudissant Paul de toutes mes forces. Malgré mes précautions, la voiture refusa d’aller au-delà des derniers mètres qu’elle venait de me consentir. C’était fini, elle n’avançait plus.
Il ne me fallu pas plus d’un quart de seconde pour analyser ma situation. Je restai pétrifié au volant, incapable de me décider à un quelconque mouvement. Il était minuit, il faisait noir et j’étais virtuellement à pieds. Un bruit sourd sur ma vitre me sortit de mes pensées, instinctivement je me saisi d’un cutter qui traîne toujours dans ma voiture. En me tournant je suis nez à nez avec un drôle de visage barbu et une bouche articulant des sons que je n’entendais pas ; une main tendue me fit comprendre tout à coup ! Non je n’ai pas de monnaie, rien à donner, non et non. Le clochard continua son chemin et je me retrouvai à nouveau seul. Glacé, paralysé d’effroi, je suis resté prostré au volant un temps qui m’a paru très long. Mais il fallu bien que je me rende à l’évidence ; je devais me décider à agir, à faire quelque chose et le faire à pieds !
Après avoir tourné et retourné la tête devant et derrière, je me décidai à ouvrir et à descendre de la voiture. La démarche mal assurée, l’alcool et la peur mêlées sans doute, je commence à me diriger vers mon domicile ; peu à peu j’accélère le mouvement de mes jambes totalement dégrisé à présent. 10mn en voiture, voyons, c’est environ le double à pieds, ½ heure tout au plus et j’ai déjà fait une partie de la route en voiture !
En levant la tête vers un lampadaire, je comprends pourquoi tout est si sombre, il n’est pas allumé, d’ailleurs aucun ne fonctionne partout où je pose mon regard.
Soudain, mon pas résonne plus fort, mes mains s’agitent dans mes pochent, la sueur monte à mon front je me retourne vivement, rien, personne ! j’ai vu ça plusieurs fois dans des films, il faut s’arrêter pour écouter si le bruit continue… Je m’arrête net, il me semble entendre la fin d’un bruit, comme un pas qui s’arrête lui aussi. Seconde ruse vue dans un film : accélérer, tourner vite au coin d’une rue, trouver un renfoncement et s’y glisser. J’en aurais le cœur net.
L’approche d’un croisement m’offre la possibilité de mettre en application ma feinte ; me voilà plaqué dans l’encadrement d’une porte cochère du centre ville à attendre mon destin qui me suit j’en suis sûr !
Le temps me paraît une éternité, je retiens ma respiration, figé tel une statue de sel, caméléon urbain je suis invisible ! Stupéfaction, j’entends un pas qui se rapproche ; je regarde fébrilement le coin de la rue d’où va surgir mon poursuivant. Les demi secondes s’égrainent, soudain une ombre apparaît, je n’ai plus besoin de faire d’effort pour rester immobile, je ne peux plus bouger ne serait-ce que le petit doigt ! L’ombre s’allonge…
On sonne à la porte, je sors difficilement du canapé.
« Ah, c’est toi ! Entre, je lisais en t’attendant. »
Partager cet article
Repost0
12 février 2006 7 12 /02 /février /2006 02:36
Ce matin, il pleut ; j’avance doucement sur la place, je dois me garer et aller au bureau de poste.
J’aime cette place, sa halle habitée par une multitude de pigeons irrespectueux…
Sur ma droite, 2 places dont une est la première, ce qui me permettra un départ sans manœuvre. Je me range, laissant donc la seconde place libre, maintenant entre 2 véhicules.
A cet instant, un pick-up me dépasse, le conducteur me jette un oeil agacé et se range devant moi ; là où il n’y a pas de place, son véhicule ferme l’accès à l’intérieur de la place ! A l’arrière, quelques planches, quelques outils et un chien attaché ; le conducteur sort et en passant jette cette fois un oeil à mon immatriculation l’air entendu ! Puis il entre dans le café.
Je reste interdit, je le regarde évoluer dans son monde, il serre des mains, et d’un simple signe de tête commande son café.
La madeleine peut surgir parfois de façon complètement inattendue. Je me vois entrant dans un café, je serre des mains, fais des signes de tête, j’embrasse 1 ou 2 personnes et sans même un signe de tête, mon café arrive sur le comptoir. C’est ma famille, mon monde, mon univers ; ici je peux tout, nulle timidité, c’est chez moi.
Je suis un « j’habite ici ».
Revenu de mes rêveries, j’entre moi aussi dans le café ; il y a une quinzaine de personnes, par groupes de 2 ou 3 ils discutent du temps, du boulot, des gosses ou du dernier match. Je ne serre aucune main, je file au comptoir, prends place sur un tabouret et je dis bonjour à la serveuse et commande un café… Je regarde les bouteilles en face de moi, je n’ose pas me lever pour prendre le journal, je fume 2 cigarettes.
J’habite ici.
Chaque semaine au supermarché, je croise les mêmes personnes en caisse, dans les rayons, aimable civilité, je dis bonjour, merci, vous de même et au revoir. J’habite ici.
Je suis enfant unique, n’ai plus d’amis d’enfance, pas de meilleur ami qui aurait usé ses culottes sur les mêmes bancs d’école, j’ai si peu de famille, si peu de contact avec eux, mais le veux-je seulement ? Mes parents sont des citadins, je n’ai pas épousé la fille de nos voisins ; j’ai déménagé 13 fois, aujourd’hui je vis au fond d’une impasse et je connais le nom et parfois la tête de 2 voisins au maximum.
J’habite ici.
J’ai mes codes, mes signes, mes langages ; je méprise l’injustice, la duplicité, la méchanceté gratuite, les bons sentiments dégoulinants, le manque de parole, d’honneur, les esprits étriqués, l’intégrisme sous toutes ses formes, l’orgueil, l’envie, les enfermements, les contraintes manu militari et globalement tout ce qui est « entendu » ou « normal » au nom de principes qui ne résultent pas du choix intime de chacun.
J’habite ici, sur la terre.
Je suis sûr de peu de choses, chaque jour est un apprentissage ; j’ai été un « j’habite ici », j’ai été un vrai con, quand je regardais en biais ceux qui rentraient dans MON bar et qui n’étaient pas des figures connues du quartier, j’ai été du côté de ce mur où tout est inné, où rien ne s’acquiert par les actes, où il suffit d’être du bar, de la rue, du quartier, du village. Je me suis retrouvé de l’autre côté de ce mur, pas volontairement au début, j’en ai souffert quelques fois, j’ai maudit Dieu et les hommes surtout, pour avoir ériger le piston au rang de valeur étalon. J’ai digéré qu’avoir des convictions, les défendre, qu’être consciencieux, honnête, appliqué et gentil ne menait pas à la reconnaissance des autres.
Je ne serais jamais grand, ici sur terre, mais aujourd’hui, dans ce bar, je sais :
J’habite ici, mais comme locataire, les autres s’imaginent propriétaires, c’est ça ma différence.
 
 
 
                                                                                              A toi mon fils…
Partager cet article
Repost0
12 février 2006 7 12 /02 /février /2006 02:35
Falloujah, 24/12/2005
 
Le Colonel J.W. Barnes a convoqué la presse ce matin pour annoncer le décès du 1695ième Marine en Irak depuis 2 ans. Le scénario, toujours le même, implacable, aussi froid et tranchant qu’une lame de rasoir : une patrouille, un guet-apens, une bombe artisanale, et les secondes classes Ramirez et Wright, le sergent chef Douley viennent grossir les rangs de ceux qui ne rentreront plus.
 
 
Butte, Montana, le 19/12/2005.
Chris,
 
Joan et Bob ont fini le bonhomme de neige, il faut le voir avec sa carotte en guise de nez ! Papa a posé les guirlandes le long des faîtières, avec le père noël au milieu du jardin, je crois que nous aurons bien travaillé.
Depuis 1 mois, nous devons déblayer devant la porte, Bob s’est retrouvé les 4 fers en l’air, maintenant il comprend l’utilité d’une pelle et d’un sac de sel !
J’ai remonté du sous-sol la boîte des décorations, demain Joan doit ramener un sapin ; Jack en de beaux, cette année encore nous le prendrons chez lui. J’ai commencé les gâteaux au miel, il m’en faut 3 de plus, les temps sont durs, même ici, certains n’ont pas notre chance. Le révérend Walden est passé, j’irai l’aider pour la distribution de repas, les bras manquent cruellement…
Samedi je me suis rendue au marché, le centre est merveilleusement décoré, toutes les vitrines sont illuminées, la mairie est visible même la nuit ; les arbres sont habillés d’écharpes multicolores et de boules lumineuses et la caserne des pompiers brille de mille feux, si j’ose m’exprimer ainsi…
A la maison, il est impossible de trouver un recoin de calme ; Meg et Fred sont arrivés hier quant à Kevin et Lily, ils sont là depuis 2 jours ; c’est une vraie fourmilière sans l’organisation, ça babille, ça rit du matin au soir.
Papa souffre de son dos, il a du, avec Bob, aller aider les Fergusson, le toit de leur grange a cédé sous le poids de la neige, nous avons pris une partie de leurs bêtes, on verra après noël pour une autre solution.
J’espère que le temps va se maintenir, tu sais combien j’aime nos champs tous blancs, sous un ciel bleu éclatant.
Je voulais t’envoyer un peu de pays à travers ces lignes, un peu de neige, à toi qui n’aurait certainement pas imaginé que noël pouvait exister sur du sable ! Nous pensons tous à toi, tu es et sera présent auprès de nous, je mettrai ta photo sur la table à côté de moi et je pendrai ta chaussette à la cheminée.
Bon je vais te laisser, d’horribles gremlins me harcèlent, ils sont affamés et menacent de manger le chien Joey.
Nous t’embrassons tous très fort, à bientôt, je te souhaite le meilleur des noël possibles dans les circonstances où tu te trouves.
 
Maman.
 
 
Falloujah, 24/12/2005, 23H45.
 
Le colonel Barnes replie, d’une main tremblante, une lettre, face à lui 150 Marines, la main sur le cœur, entonne un Star Spangled Banner. Puis, en silence, les hommes se dirigent vers la tente qui sert d’église, c’est l’heure de la messe de minuit.
 
 
Butte, Montana, 26/12/2005.
 
Le bout de papier tombe sur le sol, comme une feuille d’automne, Bob rattrape sa mère avant qu’elle ne touche le sol ; dans l’encadrement de la porte, un militaire en tenue d’apparat tient un drapeau plié. Joan ramasse le bout de papier.
 
« Le 24/12/2005, le soldat Chris Wright est tombé au champ d’honneur, en défendant son pays contre un ennemi cruel de la liberté.
A titre posthume, il lui est décerné la Silver Star.
M et Mme Wright veuillez… »
Partager cet article
Repost0
12 février 2006 7 12 /02 /février /2006 02:34
Ce matin en sortant de sa chambre Pierre est content ; c’est mardi, il y a piscine il va voir la belle Céline.
Dans la cuisine ça sent bon le chocolat, un bol fume sur la table, maman est là, allant et venant, elle est belle maman ! Papa est déjà parti au travail.
Pierre avale ses tartines, son chocolat, saute dans ses baskets, voilà c’est l’heure de partir. Oui maman, j’y vais : les dents, Pierre les oublie tous les matins.
En chemin Pierre sourit, il connaît bien ce chemin, tous les matins et tous les soirs pour revenir, il le prend. Nous sommes fin mars et le soleil pointe déjà, l’odeur de l’herbe monte du sol dans le jardin ; les arbres bourgeonnent. Rex aboie … Ho, ho, Pierre est encore passer trop prés de son portillon !
La petite rue des Roses puis à droite la grande rue, celle de la boulangerie, donne sur l’entrée de l’école.
Mais ce matin Pierre ne passe pas sous le porche.
Ce matin là la belle Céline le cherche partout son regard bleu mouillé.
Ce matin là maman décroche le téléphone.
Ce matin là papa est déjà rentré du travail.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
En France, chaque année, environ 800 mineurs se volatilisent.
Partager cet article
Repost0
12 février 2006 7 12 /02 /février /2006 02:31
8H50, je me réveille, le soleil traverse les volets, j’ai bien dormi.
Route de San Vicente del Caguàn, Clara et Ingrid roulent en voiture.
 
9H30, habillé, petit déjeuner terminé, le week-end s’annonce bien.
Un barrage, elles s’arrêtent, une discussion s’engage.
 
11H, je musarde jusqu’à la boulangerie, je bulle, pas de planning à tenir.
Fusils braqués sur elles, changement de véhicule.
 
Midi, dans le Monde on annonce un recul de 0.1% de l’activité économique en France sur le dernier trimestre.
A présent, elles marchent à travers la forêt et les marais.
 
13H, on inaugure le salon de l’agriculture à Paris.
Elles sont jetées dans une hutte boueuse.
 
15H, Janica Kostelic arbore sa troisième médaille d’or.
Dans cet endroit inhumain, dégradant, l’angoisse et la fièvre montent ; Mélanie, Lorenzo, je vous aime.
 
Et vous, que faisiez-vous ? Où étiez-vous et avec qui ?
23 février 2002, un samedi comme tant d’autres, la terre tournait, l’humanité vaquait ; je ne sais plus exactement ni quoi ni où.
Ce jour là, Clara et Ingrid sont tombées dans un chaudron où bouillaient déjà des politiques corrompus, une guérilla Marxiste, des paramilitaires, des narcos et beaucoup de dollars. Elles voulaient renverser ce chaudron, mais la démocratie se révéla un faible levier.
 
8 février 2006, 1 446 jours plus tard, c’est :
1 446 jours de peine
206 semaines de 35H
48 fin de mois difficiles
4 sapins sans guirlandes
C’est surtout 34 700 tours de cadran.
Partager cet article
Repost0